La Révolution française a, par la Terreur, freiné la marche vers la démocratie. Connu, mais il faut cependant toujours s’en expliquer :
La machine de la démocratisation inspirée des lumières, admirée par Louis XVI (ce que l’on s’efforce d’oublier), mise au monde et au moins partiellement accomplie par les Américains dès 1787, effrayait hors de toute mesure les bourgeois français.

Afin qu’elle parût inacceptable ils l’aidèrent à dériver vers l’horreur. En outre, afin d’exclure, plus sûrement encore, le peuple de la course aux privilèges (car la Révolution française n’a hélas jamais été autre chose) ils ont effrayé celui-ci en discréditant les éventuelles évolutions démocratiques qui étaient promises à un harmonieux succès : ce dont rêvait les gens éclairés du Tiers Etat et d’une toute petite partie de la Noblesse.

Il faut surtout ne voir aucun altruisme dans la masse informe des bourgeois soi-disant révoltés ni même dans la générosité occasionnelle des « gueux » les uns envers les autres, celle que le romanesque a tant vantée : ils n’ont rien à partager, ou si peu, voilà pourquoi ils le font de si bon coeur.

La prise de pouvoir par les bourgeois a retardé l’évolution de la France vers la démocratie de presque un siècle : en singeant la démocratie, en la rendant dérisoire, perverse, méchante, la bourgeoisie a soigneusement évité les vertus égalitaires de compensation des injustices naturelles et surtout, elle s’est appliquée à baffouer, infiniment plus que ne le fit jamais l’ancien régime, la Liberté et la Fraternité.

Quel drame ce fut pour les idéalistes nourris aux idées du socialisme – nous étions nombreux – de voir le « socialisme » français de la fin du XXème siècle être pétri de ce même bourgeoisisme et pratiquer la même course aux privilèges que la bourgeoisie « révolutionnaire » de la fin du XVIIIème !