L’enseignement du jeu est important, on n’y pense plus aujourd’hui que nombre de parents gagnent leur vie en perdant le temps qu’ils doivent à leurs enfants.

Il y a le jeu qu’on invente et le jeu qu’on apprend. Tout est là. Tout vient de là.
Apprendre à jouer c’est s’apprendre à jouer. L’enseignement s’accroche, s’enclenche sur cette structure fondamentale. Il faut jouer à apprendre pour retarder les effets de l’enseignement du jeu.

Ensuite les sytèmes se perfectionnent et le jeu définit ses frontières là où commence le devoir. Celui-ci peut bien partager alors les mêmes techniques et structures. Il a acquis sa place.

Plus important encore est le jeu qu’on invente, souvent par délectable ennui : se créer un univers et un espace d’inventivité sans contraintes. C’est la base même de toute démarche créative, de tout imaginaire qu’il soit ensuite artistique ou technico-scientifique n’est qu’un détail de champ d’application. Il n’y a qu’un seul et unique imaginaire créatif.
A négliger le jeu que l’on invente on perd toute aptitude créative.
A oublier la place du jeu que l’on apprend on mutile celle qu’aura ensuite le devoir.

Qui peut, ayant perdu tout cela de vue, exploiter, une fois adulte, les grandes richesses imaginaires et systématiques acquises à l’âge du jeu? Qui peut ensuite les transmettre? Qui peut encore ancrer dessus les techniques ultérieures d’acquisition, de curiosité et d’expérimentation raisonnée ?

Autre titre : de l’ennui naît le génie. C’est si vrai !
Ni loisir, ni repos, à proprement parler, cette forme de l’ennui qui se rapproche des « rêveries » éveillées d’un Bachelard est aux antipodes de ce qu’il est convenu de dénigrer sous le nom d’oisiveté.

Laissez donc vos enfants s’ennuyer plutôt que de les gaver d’activités culturelles, édifiantes, stimulantes, développantes, enveloppantes … étouffantes qui scolarisent non seulement les loisirs mais aussi le repos.

Mais qui accepte encore parmi les gens « dans le coup » les effets induits par la vacuité de l’esprit ?

En lisant Iouri Lotman, La structure du texte artistique.